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Inaptitude et reclassement :  le salarie doit prouver la déloyauté de l’employeur

Inaptitude et reclassement : le salarie doit prouver la déloyauté de l’employeur

Auteur : Maître Olivier GELLER
Publié le : 26/09/2024 26 septembre sept. 09 2024

1°/ La réforme de la procédure de licenciement pour inaptitude a institué une présomption de bonne exécution de l’obligation de reclassement. Le refus, par le salarié, d'une offre de reclassement peut le priver d’un moyen de contestation de la rupture, l’employeur étant réputé avoir satisfait à ses obligations, en la matière.


2°/ Dès 2022, la présomption légale, instaurée à rebours de la jurisprudence traditionnelle de la Cour de Cassation, voyait sa portée relativisée par cette dernière, puisque désormais conditionnée à la vérification préalable de la loyauté de l’employeur dans la mise en œuvre des recherches de reclassement.

En l’espèce, l'employeur avait proposé, non pas un poste mais trois, tandis que les postes étaient, il est vrai, éloignés du domicile du salarié. Le médecin du travail, au fait de l’existence d'un autre poste, à proximité du domicile, non évalué, avait questionné l'employeur, qui n'avait pas donné suite.

La Cour de cassation en avait, dès lors, déduit : « la présomption instituée par ce texte ne joue que si l'employeur a proposé au salarié, loyalement, en tenant compte des préconisations et indications du médecin du travail, un autre emploi approprié à ses capacités » (1).


3°/ C’est dans ce contexte juridique qu’un nouvel arrêt de la Cour de Cassation vient donner, à nouveau, pleine force à la présomption légale (2).

Aux termes de cet arrêt en date du 4 septembre 2024, les faits sont les suivants : l'employeur a proposé 9 postes au salarié, qui les a refusés car tous éloignés géographiquement de son domicile, tout en indiquant, compte tenu de l'ampleur de la Société, que des postes devaient nécessairement exister à proximité de son domicile. La Cour d'Appel de Rouen a considéré que l'employeur, ne parvenant pas à démontrer qu’il n'existait pas de poste disponible à proximité du domicile du salarié, avait dès lors manqué à la loyauté et ne pouvait donc in fine bénéficier de la présomption légale.

La Cour de cassation n'approuve pas les Juges du fond et considère que la charge de la preuve a été inversée, donnant plein effet à une proposition de poste, appropriée aux capacités du salarié et refusée par ce dernier, sans exiger que l’employeur démontre, en sus, sa bonne foi, dans le process déployé.

Il incombait, dès lors, au salarié de prouver qu'un autre poste aurait pu lui être proposé et que l'employeur aurait agi de mauvaise foi.

En somme, la présomption de bonne exécution de l'obligation de reclassement vaut jusqu'à preuve du contraire (déloyauté de l’employeur) par le salarié (3).

L’attendu mérite d’être reproduit : « lorsque l’employeur a proposé un emploi conforme aux dispositions précitées, l'obligation de recherche de reclassement est réputée satisfaite et il appartient au salarié de démontrer que cette proposition n'a pas été faite loyalement ».


4°/ Il s'agit donc d'un retour à la lettre de la réforme, qui « responsabilise » le salarié, le refus d’un poste, compatible avec son état de santé, emportant toute conséquence juridique.

Ceci étant, nul doute que :
 
  • la nature des offres de reclassement faites,
  • l’absence de possibilité de maintien dans l’emploi à proximité du domicile du salarié,
  • et les échanges avec le Médecin du travail,

Resteront dans le cœur du débat judiciaire...
___________________________________________
  1. Cass. Soc. 26 janvier 2022, n° 20-20.369
(2)     Cass. Soc. 4 septembre 2024, n° 22-24.005
(3)     Il s'agit là d'un retour aux principes généraux du droit rappelé par la Haute Cour, soit « la présomption que la loi attache à certains actes ou certains faits en les tenant pour certains, dispense celui au profit duquel elle existe, d’en rapporter la preuve »
 

Article rédigé par Maître Olivier GELLER,  Avocat Associé

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