Diaporama

Actualités

Les avocats

Précisions des motifs de licenciement

Précisions des motifs de licenciement

Publié le : 28/07/2022 28 juillet juil. 07 2022

Jean-Baptiste TRAN MINH revient sur un arrêt de la Cour de cassation qui juge que l'employeur n'a pas l'obligation de mentionner, dans la lettre de licenciement, le droit pour le salarié de demander que les motifs de rupture soient précisés (Cass. Soc. 29 juin 2022, n°20-22.220 FS-B).

Au visa de l'article L.1235-2 du code du Travail, la Cour de cassation vient de juger, dans un arrêt publié le 29 juin 2022, qu'aucune disposition légale n'impose à l'employeur d'informer le salarié de son droit de demander que les motifs de la lettre de licenciement soient précisés. C’est une solution inédite.

Depuis l'ordonnance n°2017-1387 du 22 septembre 2017, le code du travail dispose que les motifs énoncés dans la lettre de licenciement peuvent, après la notification de celle-ci, être précisés par l'employeur, soit à son initiative, soit à la demande du salarié, dans le délai et les conditions fixés par décret en Conseil d'Etat.

Ce délai et ces conditions sont précisés par plusieurs textes. L'article R.1232-13 du Code du travail dispose que dans les quinze jours suivants la notification du licenciement, le salarié peut, par lettre recommandée avec avis de réception, ou remise contre récépissé, demander à l'employeur des précisions sur les motifs énoncés dans la lettre de licenciement. L'employeur dispose d'un délai de quinze jours après la réception de la demande du salarié pour apporter des précisions, s'il le souhaite. Il communique ces précisions au salarié par lettre recommandée avec avis de réception ou remise contre récépissé. L'originalité du texte est d'ajouter que, dans un délai de quinze jours suivant la notification du licenciement, et selon les mêmes formes, l'employeur peut, à son initiative, préciser les motifs du licenciement. Les mêmes dispositions existent dans le chapitre consacré au licenciement pour motif économique, sous l'article R.1233-2-2 du code du Travail.

La lettre de licenciement, précisée le cas échéant par l'employeur, fixe les limites du litige en ce qui concerne les motifs du licenciement. A défaut pour le salarié d'avoir formé auprès de l'employeur une demande de précision des motifs, l'irrégularité que constitue une insuffisance de motivation de la lettre de licenciement ne prive pas, à elle seule, le licenciement de cause réelle et sérieuse et ouvre droit uniquement à une indemnité qui ne peut excéder un mois de salaire.

On le voit, ces nouvelles dispositions légales permettent à l'employeur de préciser spontanément, après la notification du licenciement, les motifs du licenciement. Il s'agit bien d’apporter des précisions et non de remédier à une absence totale d'énonciation des motifs dans le courrier de licenciement.

Du côté du salarié, si celui-ci n'a pas formé auprès de l'employeur une demande de précision des motifs, l'insuffisance de motivation de la lettre de licenciement ne peut priver, à elle seule, le licenciement de cause réelle et sérieuse et se trouve ainsi reléguée au rang de simple irrégularité de procédure.

Dans l’affaire du 29 juin 2022, une salariée avait saisi la juridiction prud'homale, le 15 mars 2018, en nullité de son licenciement pour faute grave et en contestation de son bien-fondé. A l’appui de son pourvoi, elle reprochait à l'employeur de ne pas avoir mentionné dans la lettre de licenciement qu’elle pouvait, en vertu de l'article R. 1232-13 du code du travail, lui demander d'apporter des précisions sur les motifs de sa rupture. En l'espèce, la cour d'appel de Colmar avait relevé que l'employeur n'avait pas informé la salariée de cette possibilité dans la lettre de licenciement mais que pour autant, l’intéressée s'était abstenue de lui demander de lui préciser les motifs de la rupture.

La salariée critiquait également la cour d'appel pour avoir affirmé que la lettre de licenciement s'avérait précisément motivée, alors même qu'elle ne comportait ni le nom des salariés imputant à la requérante des faits de harcèlement moral, ni la date de ces faits, ni la durée de ces prétendus agissements. Elle soutenait ainsi qu'une lettre de licenciement n'est suffisamment motivée que si elle fait état de motifs matériellement vérifiables.

La Cour de cassation a rejeté le pourvoi de la salariée en deux temps. Tout d'abord, la haute juridiction juge, et c'est là une position de principe, qu'aucune disposition légale n'impose à l'employeur d'informer le salarié de son droit de demander que les motifs de la lettre de licenciement soient précisés. Ensuite, la lettre de licenciement énonçait un grief tiré d'un comportement et de propos déplacés de la salariée à l'égard de quatre collaborateurs de nature à mettre en péril leur santé psychique et à dégrader leurs conditions de travail. La Cour de cassation juge que ce motif de licenciement était précis et matériellement vérifiable. Autrement dit, la lettre de licenciement répondait à l'exigence légale de motivation.

En synthèse, il faut donc retenir de cette décision que :

L'employeur n’a pas l’obligation d'informer le salarié, dans le courrier de licenciement, de son droit de demander des précisions sur les motifs, une telle obligation n’étant pas prévue par l’article L.1235-2 du code du travail.

L'exigence de motivation de la lettre de licenciement est respectée dès lors que le motif invoqué est suffisamment précis et matériellement vérifiable. Il est donc possible, comme en l'espèce, pour l'employeur de reprocher des faits de harcèlement moral à un salarié, sans pour autant qu'il soit nécessaire de préciser l'identité des victimes. En effet, la décision de l'employeur et les éléments dont il dispose pour la fonder peuvent, le cas échéant, être ultérieurement discutés devant les juridictions de jugement.

Historique

<< < ... 11 12 13 14 15 16 17 > >>
Navigateur non pris en charge

Le navigateur Internet Explorer que vous utilisez actuellement ne permet pas d'afficher ce site web correctement.

Nous vous conseillons de télécharger et d'utiliser un navigateur plus récent et sûr tel que Google Chrome, Microsoft Edge, Mozilla Firefox, ou Safari (pour Mac) par exemple.
OK