Avis d’inaptitude avec dispense de recherche de reclassement : attention à la rédaction de l’avis
Auteur : Christian BROCHARD & Paola Girardin
Publié le :
09/03/2023
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Lorsqu’un salarié est déclaré inapte par le Médecin du travail, l’employeur doit tout mettre en œuvre pour le reclasser sur un autre poste.
Cependant, le législateur a introduit deux cas de dispense à cette obligation de reclassement permettant à l’employeur de procéder directement au licenciement du salarié déclaré inapte.
En effet, l’employeur est dispensé de cette recherche de reclassement, si dans l’avis d’inaptitude, le Médecin du travail a coché l’un des deux cas de dispense de reclassement suivant :
- « tout maintien du salarié dans un emploi serait gravement préjudiciable à sa santé » ;
- « l’état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans un emploi ».
Dans la première affaire soumise (n 21-19.232), un salarié est déclaré inapte par le Médecin du travail, lequel a coché le cas de dispense suivant « l’état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans un emploi ».
Par suite de la rupture de son contrat de travail, le salarié a saisi la juridiction prud’hommale afin de contester le bienfondé de cette dernière.
Au terme de la procédure prud’homale, le salarié qui ne contestait pas le cas de dispense dont il avait fait l’objet, a soutenu que celui-ci était limité au périmètre de l’entreprise et non pas au groupe auquel appartient cette dernière.
En d’autres termes, le salarié a affirmé que son employeur aurait dû tenter de le reclasser non pas au sein de son entreprise mais au sein des autres entreprises du groupe.
La Cour d’appel comme la Chambre sociale de la Cour de cassation ont rejeté son argumentation au motif que l’avis d’inaptitude mentionnant expressément l’impossibilité de reclassement dans un emploi et non dans l’entreprise, l’employeur pouvait engager la procédure de licenciement sans procéder au préalable à une recherche de reclassement.
Dans la seconde affaire (n 21-11.356), une salariée d’un Comité Social Economique (CSE) est déclarée inapte par le Médecin du travail, par avis libellé dans les termes suivant : « Inapte. L’état de santé de la salariée fait obstacle à tout reclassement dans un emploi dans cette entreprise. Échange avec l’employeur en date du 4 juillet 2017 (étude de poste faite) ».
Son employeur a procédé à son licenciement, sans rechercher au préalable des postes de reclassement.
Tout comme dans le premier arrêt, la salariée a contesté son licenciement au motif qu’un poste de reclassement aurait dû être recherché au sein du CSE, mais également au sein de l’entreprise ayant mis en place l’instance.
La Cour d’appel comme la Chambre sociale de la Cour de cassation ont jugé que :
- Le Médecin du travail avait précisé que l’état de santé de la salariée faisait obstacle à tout reclassement dans un emploi dans l’entreprise (et non pas dans le groupe) ;
- un groupe de reclassement était constitué par le CSE, en sa qualité d’employeur de la salariée et l’entreprise au sein duquel il était mis en place.
Dans ces conditions, la juridiction d’appel comme la Cour de cassation en ont déduit que l’avis du Médecin du travail ne valait pas dispense de recherche de reclassement, de sorte que l’employeur était tenu de rechercher un emploi disponible au sein de l’entreprise, avant de procéder au licenciement de la salariée.
Puis, la Cour de cassation a confirmé qu’en ne procédant à aucune recherche de reclassement, l’employeur avait manqué à son obligation et privé le licenciement de cause réelle et sérieuse.
Par ces deux arrêts, la Haute juridiction vient donc rappeler à la vigilance les entreprises appartenant à un groupe dont l’un des salariés est déclaré inapte avec cas de dispense de recherche de reclassement.
Dans une telle hypothèse, les entreprises ont tout intérêt à lire avec attention le libellé de l’avis d’inaptitude puis, en cas de doute, d’interroger le Médecin du travail sur le périmètre du cas de dispense coché dans l’avis d’inaptitude.
Article corédigé par Maître Christian BROCHARD, Avocat associé, et Paola Girardin, Juriste.
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